21 mars 2024

Sections départementales

Déclaration de la FSU au CSA-SD second degré jeudi 21 mars 2024

Après avoir supprimé près de 9000 équivalents temps plein dans le second degré depuis 2018 malgré des effectifs en hausse, le gouvernement poursuit son entreprise de démolition du service public d’éducation. Il conforte ainsi la France dans son titre peu enviable de pays avec les classes les plus chargées d’Europe (DEPP, 2023). En Ardèche, l’hémorragie se poursuit avec un solde de moins 9 postes prévu à la rentrée 2024. Ce ne sont pas moins de 34 postes qui auront ainsi été supprimés dans le département en 5 ans. C’est l’équivalent d’une équipe complète d’enseignant-es pour un collège de taille moyenne ! Alors qu’il prétend tout mettre en œuvre pour remédier à la baisse des résultats des élèves dans l’enquête PISA, le MEN retire année après année les moyens nécessaires aux dispositifs d’accompagnement des plus fragiles. A titre d’exemple, la suppression d’un poste de lettres modernes l’an prochain au collège REP Les Perrières, se traduira par la disparition de l’AP dispensé depuis des années et pourtant jugé indispensable par l’équipe.

Dans ce contexte de paupérisation général, la publication des textes règlementaires sur le « choc des savoirs » est comme un immense bras d’honneur adressé à la profession. Les enseignant-es sont contre, les chef-fes d’établissements sont contre, les parents sont contre, les scientifiques en éducation sont contre… Mais le gouvernement s’en moque et passe en force !
Concrètement, les groupes en français et en mathématiques sont impossibles à mettre en œuvre dans des bonnes conditions. La mise en barrettes de toutes les heures dans ces disciplines, l’obligation de mener une progression commune, la nécessité de multiplier les niveaux d’enseignement, l’alternance semaines en groupe/semaines en classe… feront peser des contraintes ingérables sur les collègues. Si une prime de 1800€ est annoncée pour soutenir les chef-fes d’établissements dans la mise en œuvre de ces usines à gaz, rien n’est prévu pour les professeur-es dont les conditions de travail vont se dégrader considérablement. Avec pour corollaire une baisse de la qualité des enseignements, une augmentation des situations de souffrance au travail et, in fine, des démissions (les salles des profs bruissent de projets de reconversion professionnelle). Par ailleurs, il ne sera matériellement pas possible de mettre en place ces groupes partout en l’absence de professeur-es de maths et de français supplémentaires. Pas plus qu’il ne sera possible d’alterner avec une organisation en classe, dite « dérogatoire » (sic), de 1 à 10 semaines dans l’année.

Comment organiser des retrouvailles d’élèves en classe entière s’il y a des groupes surnuméraires ? Quel-les professeur-es pour quelles classes ? Quel enseignement dispenser face à des élèves qui auront vu des méthodes et des éléments du programme différents selon leur groupe ? Quel sort sera réservé aux professeur-es des regroupements surnuméraires sans élèves pendant ces périodes ? Quel impact cette organisation de groupes aura-t-elle sur les emplois du temps des autres matières, et notamment en EPS par rapport aux questions d’installations sportives ? Comment attribuer des moyens pour la mise en place de ces groupes sans siphonner les autres dispositifs, et des moyens donnés à l’EPS (par exemple un enseignant surnuméraire en natation, escalade…) ? Etc. Enfin, notre capacité de suivi des élèves sera également mise à mal dès leur arrivée au collège. Comment assurer sérieusement la fonction de professeur-e principal-e si l’on ne voit une partie de ses élèves, qu’à titre dérogatoire, quelques semaines au maximum !

Mais le gouvernement se préoccupe-t-il vraiment des conditions d’enseignement et d’apprentissage ? Clairement non ! L’essentiel est ailleurs, dans le fond idéologique d’une réforme dont il devient évident qu’elle n’a pour objectif que de restreindre l’accès à l’éducation aux élèves issus des classes populaires. D’abord en enfermant les élèves dès 11 ans dans des parcours différenciés dans les matières « fondamentales ». Ensuite en fermant la porte des 3 voies du lycée aux élèves qui n’auront pas le DNB. Diplôme qui doit devenir plus difficile à obtenir selon les vœux du gouvernement, G. Attal a annoncé lui-même une baisse importante du taux de réussite. Enfin, en passant les rescapé-es à la moulinette de Parcoursup, qui a de plus en plus de mal à cacher qu’il sert surtout à rendre sélectif l’accès à l’enseignement supérieur. La restriction de l’accès au lycée constitue une rupture historique avec la finalité d’augmentation générale du niveau de qualification. L’éducation coûte cher, le gouvernement entend désormais confisquer la majeure partie des dépenses au profit des seules classes moyennes et supérieures.

C’est un retour en arrière de plus de 50 ans, à l’époque où seuls les enfants de la bourgeoisie accédaient massivement aux études supérieures. Ce virage à 180° des finalités de l’école s’oppose au projet d’une société démocratique fondée sur l’émancipation des individus. C’est profondément contraire au sens de notre métier et aux valeurs du service public pour lesquelles nous nous sommes engagées. Nous appelons à refuser la mise en œuvre de cette réforme inacceptable.