7 juillet 2009

Nos métiers

Pourquoi le SNES refuse le protocole CDI

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Cet article n'est probablement plus d'actualité

Alors qu’un seul groupe de travail a été consacré au protocole sur le CDI et qu’il devait être encore débattu et validé en CTPA de janvier (comité technique paritaire académique) par toutes les organisations syndicales, ces dernières l’ont boycotté. Malgré l’absence de la quasi totalité des organisations syndicales (seul le SGEN était présent) au CTPA suivant, le rectorat a choisi de le valider et de passer en force avec précipitation. Inadmissible pour le SNES qui retrace toutes les étapes de cette marche forcée et vous informe des risques que font peser plusieurs points de ce protocole. Quelle que soit l’attitude du rectorat, le SNES ne compte pas en rester là et prendra toutes ses responsabilités pour alerter les autres organisations syndicales.

Le SNES ne s’oppose pas à l’idée d’un encadrement des règles de gestion des agents en CDI. Seulement nous contestons formellement la méthode retenue par le rectorat ainsi que le contenu de ce protocole qui fait peser sur les collègues plusieurs dangers et à notre sens avantage surtout le rectorat.

UNE METHODE CONTESTABLE

La méthode : tout s’est fait dans la précipitation. Le rectorat a proposé dans un premier temps une première mouture de ce protocole lors du groupe de travail du 9 juin 2008. Ce groupe de travail était consacré à l’application de la loi sur le CDI et aux critères d’accès au CDI. La gestion des agents en CDI n’y a donc pas alors été abordée d’autant plus que la distribution du premier projet le jour même ne favorisait pas la préparation des débats contradictoires... Le secrétaire général du rectorat annonçait donc la tenue d’autres groupes de travail après la rentrée sur ce protocole.

Après prise de connaissance de ce premier projet, le SNES a adressé au rectorat un premier courrier pour faire part entre autres de ses réactions sur notamment les rémunérations des CDD et la grille indiciaire très basse des agents en CDI d’abord proposée (dans le premier projet, la grille indiciaire des agents en CDI proposée plafonnait à l’indice 447), sur l’élargissement délétère des missions imposées par le rectorat -comme si les conditions d’exercice ne suffisaient pas- et la mobilité outrancière imposée (accepter un poste dans toute l’académie !).

Voici l’intégralité du courrier envoyé le 17 novembre 2008 au rectorat, avant le groupe de travail du 25 novembre :

"Jacques AGNES
Secrétaire académique du SNES

Vincent LOMBARD
Gabriel EMERY
Céline BONNEFOY
Responsables des « non-titulaires »

à

Monsieur le Recteur de l’Académie de Grenoble

Saint Martin d’Hères le 17 novembre 2008

Monsieur le Recteur,

Suite au groupe de travail sur les non-titulaires du 9 juin dernier, nous souhaitons apporter quelques observations sur le document de travail relatif au CDI et remis à cette occasion.

Tout d’abord, il convient de mentionner, dans le rappel des textes législatifs, le décret n° 81-535 du 12 mai 1981 relatif au recrutement de professeurs contractuels, modifié par le décret n° 89-520 du 27 juillet 1989 ainsi que l’arrêté du 29 août 1989 modifié fixant la rémunération des professeurs contractuels. Il doit également être précisé que le décret n°86-83 du 17 janvier 1986 a été modifié le 12 mars 2007 ( la version du 12 mars apporte notamment l’obligation de passer en CDI les agents à temps incomplets justifiant de six ans de services).

De même les maîtres auxiliaires ne doivent pas voir disparaître les références aux textes les régissant : décret n° 62-379 du 3 avril 1962, circulaire n° 91-0355 du 18 février 1991, circulaire du 12 avril 1963.

En ce qui concerne les affectations, le passage en CDI ne justifie pas pour autant que le rectorat exige un élargissement des missions de l’agent tel que vous le proposez, en fonction « des besoins du service ». Les fonctions d’enseignement, d’éducation, de documentation de chef de travaux exigent des compétences bien spécifiques et on conçoit mal que des agents en CDI puissent passer de l’un à l’autre au pied levé sans aucune formation et garantie et sans conséquence sur la qualité des services fournis. Dans ces conditions, le problème de l’évaluation se pose également. Qu’adviendra-t-il d’un agent en CDI initialement professeur d’histoire-géographie et auquel on aura sommé de remplir des fonctions de conseiller principal d’éducation s’il se retrouve en difficulté dans cette nouvelle fonction ? Nous nous opposons donc à ce principe. Il convient plutôt de rattacher les personnels provisoirement à un établissement s’ils n’ont pu avoir d’affectation sur poste vacant dans l’attente d’une suppléance et de leur demander d’assurer des tâches éducatives comme cela est le cas pour les MA. Dans tous les cas ces affectations hors spécialité ne doivent être possibles qu’avec l’accord des intéressés.

De même la mobilité requise est excessive lorsqu’il est indiqué que « l’agent peut être nommé sur tout le territoire de l’académie, compte tenu des besoins du service. » Le CDI est censé apporter quelque stabilité aux non-titulaires. Il est là encore inconcevable que le rectorat puisse exiger d’un agent d’exercer de part et d’autre de l’académie. Les conséquences sur la vie privée seraient lourdes. Nous demandons que des garde-fous soient instaurés par la mise en place de zones.
Quant à la rémunération des agents en CDI, nous observons que la grille proposée plafonne à l’indice 447. Nous proposons que l’évolution des indices de rémunération des agents en CDI soit aussi calquée sur la grille de rémunération des MA II pour les ex-CDD à compter de l’indice 367 et qu’au-delà de l’indice 447 l’avancement soit calqué sur la grille des MA I pour tous, contractuels et MA.

Enfin nous espérons que le groupe de travail du 25 novembre prochain nous apportera également des réponses aux divers points que nous avons soulevés à plusieurs reprises sur la situation de l’ensemble des non titulaires : rythme d’avancement de la rémunération des agents qui ne sont pas en CDI, prise en compte des périodes de vacations dans l’ancienneté permettant le changement d’indice, avancement de date à date, transparence des affectations, limitation du recours à la vacation.

Nous vous prions d’agréer, Monsieur le Recteur, l’expression de nos salutations distinguées.

Jacques Agnès Vincent Lombard Gabriel Emery

Hormis une évolution de la grille indiciaire des agents en CDI proposée dans le projet initial, le groupe de travail du 25 novembre 2008 consacré à ce protocole n’a pas apporté d’évolution considérable par rapport au premier projet, hormis une évolution de la grille indiciaire des agents en CDI proposée dans le projet initial.

Dans le deuxième projet proposé, la grille indiciaire plafonne désormais à l’indice 650 (au bout de 36 ans dans le meilleur des cas, si l’avancement n’est pas repoussé).
C’est mieux certes que la première mouture mais le SNES n’a pas manqué de relever tout l’écart que constitue ce simulacre de carrière avec la rémunération d’un titulaire sur toute une carrière. Comparons pour voir !

UNE CARRIERE AU RABAIS

CERTIFIE

Indice Durée dans l’échelon

349 3 mois

376 9 mois

395 1 an

416 2 ans 6 mois

439 3 ans 6 mois

467 3 ans 6 mois

495 3 ans 6 mois

531 4 ans 6 mois

567 5 ans

612 5 ans 6 mois

658

grille qui de surcroît n’a pas été revalorisée depuis 1989

CONTRACTUEL

5 ans de CDD (sans prise en compte des vacations) :

indice 321 pour ceux recrutés avant 2009
indice 367 à compter du 1er février 2009

lors de la signature du CDI (minimum 6 ans) : 388

puis tous les 3 ans dans le meilleur des cas (changement d’indice non automatique contrairement à un titulaire) :

Indice Durée dans l’indice

321 et 367 6 ans minimum

388 3 ans maxi 5 ans
(maxi 5 ans clause protocole CDI)

410 3 ans maxi 5 ans

431 3 ans ou 5 ans max

453 3 ans ou 5 ans max

475 3 ans ou 5 ans max

498 3 ans ou 5 ans max

523 3 ans ou 5 ans max

548 3 ans ou 5 ans max

573 3 ans ou 5 ans max

598 3 ans ou 5 ans max

623 3 ans ou 5 ans max

650 3 ans ou 5 ans max

La comparaison des deux déroulements de carrière met clairement en évidence en évidence l’écart considérable qui sépare notamment les débuts de carrière d’un certifié -qui a de surcroît perdu 20 % de son pouvoir d’achat en 20 ans-, et d’un contractuel. Alors qu’un certifié atteint l’indice 395 au bout d’un an, un contractuel met au minimum 6 ans pour atteindre péniblement l’indice 388. Il ne faut pas oublier aussi que des non titulaires comme les maîtres auxiliaires ont cumulé des années de précarité sans que leur grille soit revalorisée ; d’autres ont enchaîné bien plus que six ans de CDD avant de passer en CDI sans qu’un reclassement soit envisagé. Cela est inacceptable.

Au bout de deux ans, un titulaire atteint l’indice 416 alors que l’agent en CDI est rémunéré à l’indice 410 au bout de 9 ans minimum ! Tout cela ne nous a pas échappé et, le rectorat proposant aux organisations de lui faire part éventuellement de leurs observations par courrier avant le CTPA (comité technique paritaire académique) prévu du 19 janvier, nous avons fait part au rectorat de nos observations dans un deuxième courrier que nous vous communiquons dans son intégralité :

" Saint Martin d’Hères, le dimanche 4 janvier 2009

Objet : protocoles CDI

Monsieur le Recteur,

Suite à votre courrier du 15 décembre 2008 portant sur les protocoles relatifs aux contrats de travail à durée indéterminée, nous vous faisons parvenir nos observations.

Dans la partie « Missions », la formulation actuelle ne garantit pas que l’éventuel changement de mission qu’imposera l’administration ne sera pas définitif alors que cela devrait être l’exception (dans le mesure où un tel changement de mission ne pourrait être imposé que si aucun CDD et vacataire n’était par ailleurs recruté) et le dernier recours avant le licenciement. Il est également nécessaire que les collègues qui n’accepteraient pas un changement de missions puissent prétendre à leurs indemnités de licenciement puisque ces missions ne correspondraient pas à leur discipline initiale. C’est pourquoi nous proposons d’amender la formulation que vous proposez ainsi :
« L’agent contractuel assure une mission d’enseignement, d’éducation ou d’orientation. Cette mission est définie dans le contrat de l’agent.
Toutefois, si les besoins dans les domaines ci-dessus mentionnés évoluent, voire disparaissent, le recteur peut être amené à confier à l’agent à titre provisoire et avec son accord expresse de l’intéressé et de façon subsidiaire et en fonction de ses compétences et des besoins de service, une autre mission (enseignement, documentation, éducation, chef de travaux, attaché de laboratoire …) : l’agent contractuel bénéficie en conséquence d’un accompagnement pour ce changement de mission (tutorat, formation…). Il est toujours considéré comme recruté dans sa discipline initiale et y demeure prioritaire dès que la mission cesse. Sa situation est réexaminée dès que le besoin subsidiaire cesse ».

Pour ce qui concerne encore les missions, les maîtres auxiliaires doivent pouvoir bénéficier de conditions particulières. Nous vous rappelons que, par le biais de M. Duwoye alors directeur des ressources humaines, le ministère a pris l’engagement de rattacher dans un établissement les maîtres auxiliaires ne pouvant être placés dès la rentrée sur poste vacant et de ne leur demander que d’assurer des tâches d’enseignement ou de documentation dans l’attente d’une suppléance sans que de surcroît la quotité de leurs services dépasse 18 heures pour les maîtres auxiliaires d’enseignement. Le rectorat de Grenoble ne peut donc revenir sur un engagement ministériel pris de longue date et toujours respecté depuis partout ailleurs. Il est normal que les maîtres auxiliaires voient les garanties liées à leur « statut » respectées d’autant plus que leur grille de rémunération n’a pas été revalorisée et que les écarts entre celle des agents en CDI ex-CDD et celle des agents en CDI ex-MA sont significatifs. Le SNES demande donc que la rédaction de votre protocole rétablisse ces droits et que les circulaires de rentrée ministérielles concernant les maîtres auxiliaires soient respectées.

Quant à la rémunération des agents en CDI, vous proposez qu’elle soit réexaminée tous les 3 ans. Nous vous rappelons que la circulaire du 26 novembre 2007 à laquelle vous faites implicitement référence précise que le réexamen de la rémunération de l’agent doit avoir lieu « au moins » (sic) tous les trois ans. Rien n’empêche donc l’administration de choisir une périodicité plus favorable pour l’agent. Nous pensons que, les premières années au moins, un avancement plus rapide pourrait être prévu afin de permettre aux non titulaires de compenser en partie l’écart considérable qui les sépare des titulaires en début d’exercice d’autant plus que l’académie de Grenoble aura retenu pendant longtemps l’indice 321, le plus bas de la grille de rémunération des contractuels. Certains points méritent également d’être explicités. Dans la partie « Grille indiciaire et avancement » de la page 3 des protocoles des agents ex-CDD, MGI et section internationale, la phrase « mais ce réexamen n’entraîne pas automatiquement un changement d’indice » nous semble surabondante. Nous pensons également que pouvoir retarder l’avancement jusqu’à cinq ans est abusif. Il faudrait davantage accorder de garanties à l’agent et expliciter qu’en cas d’évaluation défavorable de ce dernier selon la périodicité prévue, l’agent en question serait réévalué l’année suivante. Et bien indiquer qu’en tout état de cause le retardement de l’avancement d’un agent en CDI doit être l’exception et non pas la règle et qu’il doit être dûment justifié par l’administration et examiné en CCP. En tout cas, nous pensons que la partie des protocoles portant sur la rémunération mériterait d’être à nouveau débattu.

Cette même circulaire apporte des éléments totalement absents du protocole et qui méritent selon nous d’être retenus : « Chaque administration peut faire le choix d’organiser ces entretiens suivant une périodicité plus rapprochée et de l’aligner par exemple sur les pratiques en vigueur pour les fonctionnaires notamment ceux exerçant des métiers comparables. L’entretien est conduit par le supérieur hiérarchique de l’agent. L’entretien doit donner lieu à un compte rendu écrit. Avec un objectif de pleine transparence, le compte rendu est signé par l’agent dans un délai raisonnable. Des observations peuvent être apportées à ce compte rendu, sur demande de l’agent. Il lui est communiqué et est versé à son dossier. » (p 9 de la circulaire du 26 novembre 2007).

Enfin, lors du débat du 25 novembre, vous avez émis l’idée de fixer les agents en CDI définitivement sur un même poste d’une année sur l’autre. Nous avons émis des réserves : d’une part nous approuvons la nécessité d’offrir une certaine stabilité géographique aux contractuels en CDI ; d’autre part, cette stabilité ne doit pas se faire au détriment des affectations et mutations des titulaires. Le gel des postes pose en effet le problème du blocage du mouvement, en particulier dans certaines disciplines et dans un contexte de diminution des emplois. Nous devons débattre de cette concurrence et du dispositif qui permettrait une réponse équilibrée à cette question dans nos instances délibératives. Dès que nous aurons arrêté une position à ce sujet, nous vous la soumettrons.

Vous précisez que vous envisagez de soumettre les projets de protocole au CTP du 19 janvier 2009. Nous demandons que Monsieur Vincent Lombard, qui sera l’un de nos représentants à la CCP concernée, soit convoqué à titre d’expert à ce CTP.
Veuillez agréer, Monsieur le Recteur, l’expression de nos respectueuses salutations.

Jacques Agnès Vincent lombard Gabriel Emery

Céline Bonnefoy"

L’avant dernier paragraphe mérite une explication : dans un premier temps, le secrétaire général du rectorat envisageait de fixer les agents en CDI dans un établissement. Cela représentait un danger à la fois pour les titulaires (en freinant les possibilités de mouvement) et pour les non titulaires eux-mêmes car que serait-il advenu d’un non titulaire non satisfait de l’affectation définitive qu’on lui aurait imposé puisque les non titulaires ne peuvent muter ?

DERNIERE ETAPE : LE PASSAGE EN FORCE

Pour protester contre les suppressions de postes massives au budget 2009, toutes les organisations syndicales ont boycotté le CTPA du 19 janvier 2009 au cours duquel le protocole CDI devait être rediscuté et mis au vote.

Au second CTPM, seul le SGEN-CFDT a siégé, les autres organisations continuant à boycotter afin de s’opposer notamment aux suppressions de postes. Curieusement, le secrétaire général du rectorat a estimé que cela suffisait pour faire valider son projet ... et en l’absence de l’organisation la plus représentative, qui a obtenu trois sièges sur quatre aux élections professionnelles, le SNES ...

POURQUOI TANT DE PRECIPITATION ?

Interrogé sur la précipitation avec laquelle laquelle il a voulu faire passer son protocole CDI, le secrétaire général a répondu à la CCP du 29 juin dernier, la main sur le cœur et les bons sentiments aux lèvres (« Il y a eu effectivement une précipitation car on voulait que le collègues changent d’indice dès le mois de janvier »), qu’il ne voulait surtout pas retarder le changement d’indice auquel pouvaient passer les personnels en CDI dès janvier. Prenons le rectorat au mot : Si ne pas priver les personnels d’avancées est vraiment ce qui l’anime, pourquoi plusieurs dizaines de collègues ont-il dû attendre près de trois ans après la loi sur le CDI (juillet 2005) pour la voir appliquée ? Si le rectorat était tant pressé de faire bénéficier les collègues d’avancées, pourquoi n’a-t-il pas requalifié retroactivement les CDD qui auraient dû être en CDI en juillet 2005, tels ceux de la plupart des contractuels de la cité scolaire internationale ? Cela leur aurait permis de changer d’indice …

Quoi qu’il en soit, si le SNES se bat pour que les collègues puissent bénéficier de la loi sur le CDI et de toute amélioration concernant leur rémunération, mais il ne considérera jamais que le CDI doit être le stade final... Seul le statut peut apporter un réel droit à mutation, la garantie d’emploi et des garanties sur la rémunération. Qu’ils soient sur poste vacant à l’année ou assurent des suppléances, les précaires satisfont des besoins permanents. A des besoins permanents doivent correspondre des personnels statutaires. On en revient donc à un plan de résorption de la précarité et une augmentation du nombre de postes aux concours internes.