9 décembre 2008

Publications et dossiers

Accompagnement éducatif : l’élève au centre des logiques comptables !

Cette contribution a un an, mais reste d’actualité.

Inutile de revenir sur l’objectif de l’accompagnement éducatif. Compenser les inégalités, contribuer à l’épanouissement par la pratique du sport et l’ouverture au monde de l’art et de la culture (d’ailleurs, les propos de campagne sur la gratuité des musées et des bibliothèques se sont bel et bien envolés !), nous ne pouvons que suivre cet objectif. Pourtant, depuis la rentrée de novembre, la mise en place de ce dispositif ne s’est pas faite sur le même hymne chanté par le Dauphiné libéré, le rectorat et le ministère. « Pas de doute, ils sont motivés » ouvrait le Dauphiné libéré le 11 novembre 2007 en prenant l’exemple du collège Olympique de Grenoble, sans voir qu’à quelques centaines de mètres, au collège Villeneuve, ce n’est qu’à peine un dixième des élèves qui participent à ce dispositif. Et, reprenant les annonces ministérielles et surement les propos de la communication du rectorat, la même journaliste fait le point sur le dispositif :

 une origine présidentielle de prendre en charge les « orphelins de 16 heures, livrés à eux-mêmes dès la fin des cours » ;
 3,3 millions d’euros pour 43 collèges de l’académie de Grenoble (alors que la France est en faillite selon François Fillon !) ;
 un partenariat avec le monde éducatif ;
 des professeurs volontaires rémunérés en heures supplémentaires défiscalisées : « Le tarif de base est le même pour tous : 33 euros de l’heure » ;
 un contrat passé avec l’élève : « Les enfants choisissent de rester ou pas en milieu scolaire après les cours. C’est un engagement signé de leur part. »

Dans bien des établissements, à l’heure des bilans initiés par le rectorat (voir le dossier du SNES sur l’accompagnement éducatif dans l’US magazine, supplément du n°661 du 5 janvier 2008 : http://www.snes.edu/snesactu/IMG/pdf/US_MAG_661.pdf), on s’aperçoit que dans nombre d’établissements, la mise en place de l’accompagnement éducatif s’est faite sans la moindre concertation avec les équipes éducatives, se limitant à rechercher des volontaires chez qui les propos du ministre sont souvent moins efficaces que les courriers de leur banquier, que le dispositif n’a consisté qu’en un maquillage d’actions déjà existantes menées dans les cadres des FSE et acteurs de l’éducation populaire et que sa mise en place matérielle n’a pas été pensée à la rentrée de septembre : emploi du temps incompatible, transport scolaire ne permettant pas de mettre en place des « ateliers après la fin des cours » et tout simplement la disponibilité des équipements.

Dans la pratique, que se passe-t-il vraiment ? N’en déplaise au Dauphiné libéré, beaucoup d’intervenants sont les personnels les plus précaires des établissements, les assistants d’éducation, pour qui l’heure supplémentaire est de 15 euros. Mais, si l’on rapporte ceci à leur salaire mensuel pour un temps partiel souvent contraint par la poursuite d’études universitaires, c’est le porte-monnaie qui prime.
Il se pose alors la question de ces heures pour les orphelins de 16 heures après 6 heures d’enseignements dans la journée et quelques 8 heures de présence dans l’établissement. L’accompagnement scolaire prend alors souvent place dans une salle informatique où les collégiens volontaires peuvent faire leurs devoirs, passer leur temps sur internet et demander quelquefois de l’aide au professeur ou assistant d’éducation pour qui la fatigue se fait sentir. De la réussite de tous, on dérive très vite à la garderie !

Qu’en est-il pour l’année prochaine ?

La généralisation de l’accompagnement éducatif à l’ensemble des collèges pose déjà la question du financement. Un an après l’effet d’annonce, il est clair que les louches d’HSE qui nous ont inondées à la rentrée dans le cadre de l’accompagnement éducatif ne seront plus que des petites cuillers ! Mais ce sont surtout les dérives qui pointent dès cette année qui risquent fort de se généraliser :

 la menace sur l’heure de chorale que certains recteurs semblent considérer comme un dispositif « d’accompagnement éducatif » ;
 la disparition de dispositif d’aide pour les plus en difficultés et la contractualisation toujours plus accrue pour l’élève, le rendant toujours plus responsable et coupable de ses échecs (voir Accompagnement éducatif ?! sur le site du S2 de l’Isère : De l’argent il y en a... dans les caisses du rectorat !) ;
 la validation de tous les certificats qui remplissent aujourd’hui les établissements dans le cadre de ses heures de 16 à 18 : B2I, ASSR… ;
 avec l’expérimentation dès cette année des livrets de compétence, il est fort à parier que quelques heures pourront être dévolues à la validation de ces livrets de compétence et à la préparation de tests pour redorer le blason de la France dans les enquêtes PISA (voir Bulletin n° 182 - Octobre 2007 ;
 enfin, à l’heure de l’arrivée des DHG dans les établissements, le dispositif d’accompagnement éducatif s’inscrit dans la baisse de moyen généralisé et d’une hausse du nombre de HSE dans le cadre de la politique élyséenne du « travailler plus, pour gagner… ». Les heures d’IDD en quatrième reviennent sous la forme d’une enveloppe de 200 HSE, alors que les IDD (pensés et financés) sont bien le cadre même d’une ouverture au monde de l’art et de la culture voulu par le ministère et s’intégrant dans les nouveaux programmes de matières telle l’histoire géographie en troisième.

Pour le SNES, l’accompagnement éducatif ne peut se réduire à la prise en charge « des orphelins de 16 heures », dont l’existence même renvoie aussi à l’organisation du travail dans notre société, ou à un substitut du « cours particulier ». Il ne peut justifier la suppression d’heures de cours, voire la disparition de certaines disciplines par le transfert de missions et la réduction de l’activité en classe à la stricte transmission de savoirs scolaires. En aucun cas il ne doit aboutir à moins d’école pour les élèves, et notamment pour ceux qui en ont le plus besoin.

Face à cette baisse continue des moyens, la suppression des postes, la charge accrue de travail, le mépris de nos élèves à qui l’on refuse de donner les conditions d’un travail efficace dans les classes, il nous faut nous faire entendre sur nos revendications et exiger dans les CA de :
 recenser les moyens attribués à l’encadrement éducatif et les afficher clairement ;
 clarifier les objectifs assignés à ce dispositif ;
 exiger qu’au préalable, l’ensemble des enseignements obligatoires soit assuré dans de bonnes conditions ;
 ne rien se laisser imposer en termes d’augmentation du temps de travail pour les personnels non volontaires et refuser le recours aux non-titulaires et aux personnels les plus précaires.

Au niveau académique, la section académique du SNES, avec les sections académiques du SNEP et du SNUEP, appellent les personnels d’enseignement, d’éducation, d’orientation et de vie scolaire du second degré à se rassembler, à l’occasion de la convocation du CTPA, devant le rectorat d’académie le mercredi 6 février 2008 à 14 h 30 pour protester contre les trois cents suppressions de postes prévues pour la rentrée prochaine dans l’académie, dont plus de la moitié transformés en Heures supplémentaires imposées.
Ces suppressions font suite aux 150 suppressions de l’an dernier : ces moyens supprimés au titre du décret « Robien » sur les services et qui déjà, avaient été rétablis uniquement en heures supplémentaires, après l’abrogation du décret. Pour faire « passer » ce volume d’HS, le recteur a imaginé de sortir « l’aide individualisée » en seconde et les « itinéraires de découverte » en quatrième, pourtant inscrits à l’horaire des élèves, des besoins disciplinaires des établissements et de ne les rémunérer désormais que par une poignée d’HSE (heure supplémentaire effective). Il entend également réduire les autorisations d’exercer à temps partiel et poursuivre la pratique illégale mise en œuvre cette année d’imposer une HS à des collègues à temps partiel.
Une autre conséquence de ces décisions concerne les collègues qui viennent d’obtenir leur mutation, parfois après des années d’attente : derniers arrivés dans leurs établissements, ils vont perdre leur poste, et dans un contexte de poursuite des suppressions massives de postes, ont peu d’espoir de pouvoir revenir rapidement dans leurs vœux.
Pour toutes ces raisons nous devons mettre en échec ces choix politiques et exiger une véritable réorientation budgétaire au service de la collectivité. Cela implique d’être nombreux le 6 pour imposer au Recteur de recevoir les délégations d’établissement et donner du retentissement à notre colère.