Comité Technique Départemental Spécial second degré 18 janvier 2019
DECLARATION LIMINAIRE
La France a connu fin 2018 une situation de contestation et de tensions sociales inédites en ce XXIe siècle. Les Français veulent vivre dans une société plus juste et équitable, pour tous et toutes, et ils le font savoir haut et fort, remettant en cause la politique menée par le Président Macron. Car clairement, celle-ci n’a plus seulement comme conséquence d’affaiblir un modèle dit « social et démocratique » mais bel et bien d’instaurer un État autoritaire défendant une économie ultra-libérale. Pour preuve, les réponses apportées aux manifestations des Gilets Jaunes : plus de flashballs commandés, une nouvelle loi Anti-Casseurs, des poursuites judiciaires contre les manifestant
e s et toujours aucune prise en compte des demandes. M. Macron et son gouvernement s’obstinent à tenir leur ligne, les concessions faites étant minimales et grèveront surtout le budget de l’État et de la Sécurité Sociale. Il est même à craindre que de nouvelles coupes dans la dépense publique soient effectuées en instrumentalisant les revendications de justice fiscale et sociale : certains services publics seraient en effet « dépassés » ou « trop chers ».Ce mépris affiché de la parole du peuple se manifeste hélas aussi dans l’Éducation. Dans la Fonction Publique, l’État-employeur refuse d’augmenter les salaires de ses propres agent
e s et poursuit, comme c’est le cas depuis de trop nombreuses années, le gel du point d’indice, alors que dans la foulée, des cotisations augmentent et que le passage de un à trois jours de carence a été voté. Ce mépris apparaît également dans le projet de loi « pour une école de la confiance » qui vise à inscrire dans la loi une obligation de réserve qui n’y figurait pas. Il permettrait de donner un fondement légal à des mesures disciplinaires condamnant des personnels jugés coupables de « faits portant atteinte à la réputation du service public », expression suffisamment floue pour y inclure toute critique des politiques scolaires.Nous y voyons la volonté de leur hiérarchie, à tous les niveaux, de museler les personnels et de faire taire leurs critiques et leur opposition à des réformes régressives. Nous rappelons notre attachement aux statuts et à la loi qui obligent les personnels de l’Éducation nationale à se conformer aux instructions (art.28) aux obligations de discrétion, au secret professionnel (art.26), à la neutralité (art.25) mais pas à la réserve. Fonctionnaires citoyens et non sujets, la liberté d’expression est pour les agents une garantie démocratique qui protège les usagers des services publics et protège les finalités de l’intérêt général, nous n’y renoncerons pas.
Les conditions d’exercice des agent
e s se dégraderont encore plus à la rentrée 2019 avec de nouvelles suppressions de postes alors que les effectifs dans le second degré augmentent. Cela conduit inévitablement à une hausse des effectifs par classe ; cela conduit aussi à des pertes de moyens, à des choix impossibles, à une mise en concurrence entre disciplines, à un développement de compléments de services et de contrats précaires. Même si les suppressions de postes sont camouflées par une nouvelle augmentation des HSA imposées, cela complique la tâche de répartition des moyens et pressurise les enseignant e s. Ajoutons que ces suppressions de postes ne concernent pas seulement les professeur e s mais aussi les agent e s administratifs, les CPE et AED, maillons indispensables du bon fonctionnement d’un établissement scolaire. A ce sujet, nous nous indignons encore une fois que les Assistant e s d’Éducation ne bénéficient pas de la prime REP, alors que ces collègues sont en première ligne et pâtissent déjà de contrats précaires.Ce mépris affiché se retrouve aussi dans deux réformes annoncées : celle des retraites et celle des statuts de la Fonction Publique, qui, si elles sont en cours de préparation, n’en signeraient pas moins de graves régressions. Or, face aux inégalités sociales et territoriales, au sentiment d’abandon d’une grande partie de la population, la Fonction publique a un rôle important à jouer. Sans les agent
e s, qu’ils soient dans le versant de l’État, celui de la Territoriale ou de l’Hospitalière, les missions indispensables des services publics au service des usagers ne peuvent pas être rendues, l’isolement est renforcé et les inégalités grandissent.Pourtant, dans ses vœux, le Ministre de l’Éducation Nationale exprime son souhait de gommer les inégalités, exprime à ses agent
e s tout son soutien et sa gratitude, rappelle à quel point les Missions de l’École sont essentielles et comment il est temps qu’Elle concoure à « l’élévation » des enfants qui la composent, comment Elle doit permettre de « combattre les inégalités » pour plus de « justice sociale. ». Ne sont-ce pas là des vœux pieux, lorsque un e enseignant e porte la responsabilité d’accompagner 26-27-28-29 élèves de profils différents, qui ont parfois besoin d’une aide adaptée dont ils ne disposent pas ou trop peu, lorsque les Réformes du Lycée, du Baccalauréat et de la Voie Professionnelle se mettent en place à marche forcée, diminuant l’offre de formation, entérinant les concurrences entre disciplines, entre lycées, entre territoires ? lorsque les personnels qualifiés tels que les Psy-En, Assistant e s Social e s, Infirmièr e s ou médecins scolaires sont déplacés , minorés voire supprimés ?En réalité, cette optimisation des moyens faite pour masquer les suppressions de postes casse l’égalité de traitement des élèves et met concrètement en place une Education nationale à plusieurs niveaux. Puisque Monsieur le Président nous invite à parler vrai, alors il ne faut pas laisser croire que l’élévation du niveau et la justice sociale passeront par ces réformes et les suppressions de postes. Puisque la raison d’être de l’École de la République est d’offrir un « beau chemin » aux futur
e s citoyens et citoyennes de demain, le gouvernement, dont le Ministère de l’Éducation Nationale, devrait revoir sa copie et construire une éducation à la hauteur des enjeux.