Déclaration liminaire au CTSD du 30 septembre 2021
« Une revalorisation historique » selon Jean-Michel Blanquer, l’Éducation nationale « choyée » selon Jean Castex... Derrière les grandes déclarations, la réalité est toute autre.
Encore 1883 suppressions de postes cette rentrée alors que les effectifs continuent d’augmenter dans les collèges et les lycées ; depuis le début du quinquennat d’E. Macron, ce sont près de 7500 postes qui ont été supprimés malgré 63.500 élèves de plus. Cette drastique réduction des moyens est d’autant moins acceptable qu’elle est mise en œuvre dans un contexte où l’épidémie a fortement accru les inégalités scolaires : le confinement comme les demi-jauges ont lourdement pénalisé les élèves les plus fragiles. La baisse des résultats au DNB en Ardèche (particulièrement sensible en série professionnelle) en atteste. Derrière la fable de « l’école ouverte » chère à notre ministre, ce sont donc de plus en plus de postes, de classes, d’options qui sont fermées. Mais rien de grave, rassurons-nous, les élèves pourront toujours élargir leur horizon sur leur écran plat acheté tout récemment avec l’allocation de rentrée scolaire, comme le prétend scandaleusement M. Blanquer. Et ce n’est pas le dispositif « devoirs faits », financé en heures supplémentaires, qui répondra à l’ampleur des besoins tant la capacité des équipes à les absorber à largement atteint ses limites.
Si l’Ardèche a pu un temps paraître privilégiée à cet égard, cette époque semble maintenant révolue. 30 élèves/classe en collège ne sont plus une exception, même lorsqu’il s’agit de 6e ou de classes à examen et/ou de publics socialement défavorisés. Quant aux lycées, la situation ne cesse de se dégrader : classes jusqu’à 35 et plus, groupes de spécialités qui débordent (comment préparer l’oral en spécialité LLCE à 30 ?)...
Ce constat déjà alarmant est appelé à s’aggraver puisque le gouvernement prévoit de supprimer encore 400 postes dans le second degré l’an prochain (avec 20000 élèves de plus). Les discours sur l’école choyée ou la hausse du budget de l’EN (dont la part dans le PIB est en réalité en baisse) masque mal une réalité opposée : celle d’un désinvestissement massif de l’État dans le second degré public. Le recours de plus en plus systématique aux contractuels, moins onéreux mais moins bien formés que les titulaires, ainsi que la mise en place des étudiants contractuels alternants (ALT2) accentue d’autant plus l’abandon d’un projet d’éducation de qualité tournée vers la culture commune, la formation qualifiante et l’esprit critique de nos futurs citoyens !
En ce qui concerne les salaires des professeurs, là aussi la communication ministérielle est mensongère, par exemple lorsque M. Blanquer affirme qu’il est le ministre qui a le plus augmenté les salaires des professeurs... c’est tout simplement faux ! Sa soi disant « revalorisation historique », ne concerne qu’une partie des collègues (66% des personnels étaient exclus de la première tranche de la prime d’attractivité ; 42 % ne sont toujours pas concernés par la deuxième). De plus, il ne s’agit que de primes, sans garantie de pérennisation en l’absence d’une loi de programmation pluriannuelle, et d’un montant finalement bien modeste(sur les 700 millions promis par le Ministre, il ne reste en réalité que 245 millions d’euros pour l’année2022). Quant au dégel du point d’indice, ce n’est toujours pas à l’ordre du jour. Après 10 ans d’inflation (le gel date de 2011), le recul du pouvoir d’achat des professeurs est bien réel. D’ailleurs, aucun grand pays développé ne dépense aussi peu pour ses enseignants. Ce n’est pas le SNES-FSU qui l’affirme, mais l’OCDE. Quant à la promesse d’un début de carrière à 2000 euros (annoncée par le porte parole du gouvernement), il faudrait hypothétiquement attendre après 2022 ...
La revalorisation des salaires est nécessaire et urgente pour l’ensemble des personnels. À la suite des mobilisations initiées par la FSU, le ministère instaure une grille d’avancement automatique pour les AESH. C’est bien sûr une avancée, mais encore très insuffisante pour répondre aux revendications des personnels AESH. Malgré, cela ils et elles débuteront toujours leur carrière avec moins de 800 euros net pour 24 heures avec les élèves et de nombreuses tâches annexes, voire de déplacements entre plusieurs établissements dont la plupart ne sont pas défrayés. C’est très insuffisant. Nous revendiquons la création d’un corps de fonctionnaire de catégorie B et le recrutement de plus de personnels pour répondre aux besoins. En Ardèche comme ailleurs, la mise en place des PIAL a contribué à dégrader la gestion de l’inclusion dans les établissements. La mutualisation des moyens qui en découle masque mal le manque criant d’AESH par rapport aux besoins. Il est plus que jamais nécessaire de se donner les moyens d’une véritable politique d’inclusion.
Sur le plan sanitaire, le manque d’un cadrage claire entraine plus que jamais la multiplication des injonctions contradictoires. Sous prétexte d’adaptation aux situations locales, la consigne principale semble être « débrouillez vous ! » pour ne pas le dire autrement. À l’intérieur d’une même « zone géographique », les protocoles sont aussi variés et différents que les missions d’un enseignant. Chaque établissement serait-il tellement spécifique que le virus s’y diffuserait différemment ? Ainsi donc un enseignant en poste partagé (cela ne manque pas) devra changer de salle toutes les heures le matin,mais pas l’après-midi. Il devra nettoyer lui même toutes les tables de sa classe entre les heures de cours un jour et laisser cette tâche aux agents d’entretien un autre jour. C’est à y faire perdre son latin à un enseignant de lettres classiques ! Plus sérieusement, nous attendons toujours les détecteurs de CO2, seuls outils crédibles permettant de rationaliser un tant soit peu l’efficacité de nos mesures de protection.
Nous déplorons également le manque d’intérêt et de moyens pour une vraie campagne de vaccination au sein des établissements. Mais nous ne sommes pas surpris. Après une campagne de tests et d’auto-tests chaotique et trop tardive, c’est donc une campagne de vaccination à la va-vite qui a été organisée à la rentrée. Pas ou peu d’information, peu de prévention et par conséquent très peu de volontaires pour la vaccination. Au final le travail d’information auprès de nos adolescents aura davantage été le fait des clubs et associations sportives de nos villages. C’est d’autant plus regrettable que notre département est en dessous de la moyenne nationale des vaccinés et on ne peut pas dire qu’un tel effort ne soit pas nécessaire. Mais comment mener une campagne efficace de prévention avec un personnel médico-éducatif aussi peu nombreux (un médecin scolaire pour 50000 élèves, infirmier.es scolaire en nombre insuffisant, etc).
Pour terminer, si les lycées ne relèvent pas directement de l’ODJ de ce CTSD, il nous semble nécessaire d’alerter sur la dégradation provoquée par les réformes menées à un rythme sans précédent depuis le début du quinquennat. La combinaison de Parcoursup, de la réforme du bac, de la refonte des programmes, des confinements successifs avec enseignement improvisé en distanciel et du renvoi constant au local rend toujours plus difficile pour les enseignants de donner du sens à leur travail et de tenir le rythme dans ce flou perpétuel.
Comment garder la face devant nos élèves quand les épreuves terminales ne sont plus définies ? Comment assurer aux familles que la scolarité de leurs enfants va bien se dérouler quand le flou règne dans l’orientation et que l’équité entre les élèves d’établissements différents n’est plus assurée ?
Cette pression constante plonge encore davantage les personnels dans la difficulté et les empêche de donner du sens à leurs missions. Des arrêts maladie, notamment pour burn-out, et donc des absences à compenser sont plus que jamais à craindre dans les lycées. Les rares TZR disponibles seront sans doute rapidement mobilisés. Par conséquent, il est à craindre une pénurie de remplaçants titulaires dans les collèges et les lycées du département.
La FSU continue à dénoncer ces réformes destructrices. Elle défend l’idée d’un service public d’éducation au service de tous, attentif à la réduction des inégalités.