« Le collège, c’est le cœur de l’électrochoc », a affirmé Gabriel Attal mardi 5 décembre quelques minutes après la publication des résultats de l’enquête PISA. Voilà donc dévoilé le traitement que notre jeune et ambitieux ministre entend nous faire subir. La métaphore psychiatrique a au moins le mérite d’annoncer clairement la couleur : revenir à de vieilles recettes réactionnaires appliquées de façon brutale !
En s’appuyant sur un constat d’échec partagé par tous, G. Attal prévoit un vaste programme de régression sociale, d’aggravation des inégalités et, in fine, de remise en cause du principe d’éducation commune jusqu’à la fin du collège. Les conséquences s’annoncent désastreuses !
Avec des parcours différenciés dès la 6e, « faibles », « moyens » et « forts » ne se mélangeront plus en maths et en français. Cela va à l’encontre des conclusions de toutes les études nationales et internationales, mais qu’importe ! Qu’importe également les effets psychologiques désastreux pour l’affirmation de soi d’élèves assignés à leur niveau (il ne faut pas se faire d’illusion sur la capacité des « faibles » à rattraper leur retard et intégrer le groupe des « forts ») ! Qu’importe encore l’usine à gaz que les chefs d’établissement devront mettre en place pour faire éclater les groupes classes, multiplier les heures en barrettes et ainsi dégrader considérablement les emplois du temps des collègues et leur capacité de suivi des élèves ! Il est vrai qu’il aurait été dommage de ne pas faire profiter les plus jeunes des effets délétères bien connus de la réforme du lycée !
Dans ce collège du tri social, les élèves les plus fragiles seront punis ! D’abord, par la réduction de leur temps de vacances puisqu’il pourra leur être prescrit des stages de renforcement (qui pourrait conditionner leur passage en classe supérieure) – nous sommes déjà l’un des pays avec le plus grand nombre d’heures d’enseignement, qu’importe ! Ensuite parce qu’on pourra augmenter « sensiblement » leur nombre d’heure en maths et en français en réduisant leur participation aux cours dans les autres matières. Les fondamentaux, c’est fondamental ! Et tant pis pour l’ouverture culturelle, l’apprentissage des langues, des sciences, de l’histoire-géo, l’EPS… De plus, il y a fort à parier que les groupes « faibles » vont devoir également accueillir les élèves relevant des dispositifs ULIS et SEGPA (puisque l’inclusion systématique dans les classes ordinaires est désormais l’une des priorités du Dasen de l’Ardèche). On se doute déjà que les collègues vont se faire une joie de prendre en charge de tels groupes… (notre conseil en cas de mésentente : désignez comme volontaires d’office les sympathisants du syndicat minoritaire qui défend le collège « modulaire » et les groupes de niveaux !). A peine quelques jours après le vote d’un budget qui prévoit de supprimer encore 500 postes dans le 2d degré (8000 depuis 2017), qui peut croire une seconde que l’annonce de groupes à effectifs réduits ne se fera pas à moyens constant ? La suppression de la techno en 6e n’était peut-être qu’un avant-goût…
Enfin, celles et ceux qui pensent que l’autorité des professeurs sera renforcée par le pouvoir donné sur les redoublements (avec la fin du dernier mot aux familles), sur le passage en seconde générale (conditionné à l’obtention du DNB), sur la notation (fini les compétences, il faudra des notes pour le contrôle continu au DNB – effet pression des familles garanti !), sur les parcours diversifiés (moins d’arts plastiques, plus de mathématiques !)… se trompent lourdement. C’est un pouvoir de sanction qui ne renforcera aucunement leur légitimité mais risque bien de dégrader encore leur relation avec les élèves et les familles les plus défavorisées.
Pour aller plus loin, l’analyse très complète du SNES national à lire ici : https://www.snes.edu/article/choc-des-savoirs-une-vaste-reforme-contre-le-college/