27 avril 2023

Sections départementales

En marche vers les Jeunesses Macronienne

Vous aimez le concept militariste et autoritaire du SNU ? Vous allez adorer celui du « rallye citoyen » !
Et pour cause, si celui-ci conserve l’esprit passéiste et réactionnaire du SNU tout en se parant comme son homologue de promouvoir « l’engagement citoyen », il s’adresse quant à lui directement aux élèves de 4e et 3e, et s’avère donc en ce sens bien plus insidieux. Organisé conjointement par la DSDEN et la délégation militaire départementale sur une journée entière prise, évidemment, sur le temps scolaire, une première a eu lieu le vendredi 7 avril à Privas.

DL/Walid MEMDOUHI

Ce jour-là c’est donc une centaine d’élèves volontaires des collèges privés et publics de la ville-préfecture qui se sont rendus sur les hauteurs de celle-ci. Appel au volontariat en toute discrétion puisque les équipes pédagogiques ne furent pas toujours informées.
Accueillis par quelques dizaines de militaires et autres forces armées (policiers, gendarmes), dont certains l’arme à la ceinture, mais également par le maire de la ville, les élèves se sont vu affublés d’un T-shirt blanc orné sur le devant d’un cartouche fusionnant le logo de la Délégation Militaire Départementale avec celui de l’Éducation Nationale : tout un symbole.
Une fois l’uniforme enfilé, les collégiens ont ensuite assistés en guise d’ouverture de la journée à un solennel levé de drapeau tricolore au son de la marseillaise bien entendu et avec en prime garde-à-vous des militaires présents, devoir oblige !
C’est donc dans un cadre très martial, que nos apprentis citoyens ont ensuite pu déambuler au pas cadencé au sein des 11 stands.
Si, histoire de faire bonne figure, un stand de la mairie, de la Croix-rouge ou bien du SDIS étaient de la partie, l’essentiel des stands étaient en revanche animés par les forces armées ou leurs avatars : Gendarmerie, Police Nationale, Armée de Terre en tête mais aussi le très à la mode SNU ou bien encore l’Office national des anciens combattants et victimes de guerre. Un « engagement citoyen » très orienté donc.

DL/Walid MEMDOUHI

Au sein de ces stands, les élèves ont plutôt eu affaire à une belle leçon d’embrigadement.
En effet, le point commun des présentations de chaque stand fût surtout de souligner l’accessibilité des forces armées dès la 3e sans condition de diplôme tout en insistant sur les conditions de travail et de rémunérations qui y sont avantageuses. Il faut dire qu’avec les cadeaux en série faits aux forces de l’ordre ces derniers mois et au vu du budget militaire en prévision, le secteur ne connaît pas la crise que traversent l’éducation ou la santé dans le même temps.
Cerise sur le gâteau (déjà bien sucré) et histoire de rendre le stage plus fun, la citoyenneté à la sauce Macronienne ne s’embarrasse pas d’exercices physiques. Les élèves ont ainsi pu goûter aux joies du tir au pistolet-laser mais ont également eu le plaisir d’endosser vestes kakis et casques militaires afin de s’essayer à une mission de surveillance avec, pour les plus chanceux, embarquement dans un VBL.

DL/Walid MEMDOUHI

Enfin, après s’être vu décernés les félicitations du préfet et du Dasen en personne, lequel aura pu auparavant palabrer avec ses nouveaux collaborateurs en treillis, les élèves se sont vu remettre un sac-souvenir siglé « armée de terre » rempli de goodies : stylos, carnets, flyers et autres porte-clés aux couleurs de la gendarmerie ou de l’armée, mais aussi et surtout planning des permanences pour s’engager chez ces derniers.

Ce « rallye citoyen » censé promouvoir « l’engagement citoyen » s’avère donc être en réalité une opération d’embrigadement et d’endoctrinement au service d’un projet militariste édicté par un gouvernement qui poursuit son inquiétante fuite en avant autoritaire.

Par un tour de Novlangue dont elle est devenue coutumière, l’administration sème la confusion entre engagement citoyen et engagement dans les forces armées. A l’heure où les associations caritatives, écologiques ou sociales (dont aucune ne fût partenaire de la journée...) tirent la sonnette d’alarme sur leur manque de moyens humains et matériel ; A l’heure où celles qui défendent les droits humains sont publiquement remises en cause ; il s’agit d’une dérive alarmante et inacceptable profondément contraire aux valeurs de l’école.

Si le projet, voué à être reconduit l’an prochain, concernait cette année uniquement les élèves volontaires du bassin privadois, il y a fort à craindre que celui-ci soit étendu dans les années qui viennent à d’autres collèges ardéchois.