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Cette année, comme en 2009, nous n’avons pas fait la rentrée.
Une journée avait alors suffi, avec des personnels mobilisés à 100%, pour que l’on nous octroie une division de 6e supplémentaire en raison de l’augmentation des effectifs que nous signalions depuis plusieurs mois.
Les temps changent. En période d’austérité budgétaire, la hiérarchie renâcle davantage. Cette année, il a donc fallu 9 jours de grève, reconduite à l’unanimité chaque jour par les enseignants et l’équipe Vie Scolaire, pour obtenir le poste et demi de surveillance qui nous était dû.
A l’origine, en bref
Juillet 2016. Annonce de la suppression de deux CUI. Nous nous rendons à l’Inspection académique pour expliquer que nous ne pourrons pas faire la rentrée : 50 élèves de plus intégreront le collège en septembre. On se demande où ils ont appris à compter. Aucune suite n’est donnée.
30 août 2016, pré-rentrée. Nous déposons un préavis de grève.
5 septembre : aucune réponse, début de la grève. En plus du poste et demi de surveillance, nos revendications incluent également les conditions de travail des agents, qui ont besoin de davantage de stabilité sur leurs postes, et les collègues AESH pour qu’ils soient affectés à temps plein.
Nous avons l’expérience au collège Vercors de mobilisations à l’échelle locale qui ont duré et ont permis de satisfaire les demandes. La présence depuis 2012 d’une cheffe d’établissement qui nous fait confiance et soutient les actions collectives, sans chercher à diviser ni à favoriser, a contribué à la force de notre collectif.
En cette rentrée, nous nous lançons sans hésitation dans la bataille : une telle dégradation de nos conditions de travail est inacceptable, il nous serait impossible de travailler cette année avec une équipe vie scolaire à flux plus que tendu. Ce n’est pas tant l’enjeu de la sécurité qui est mis en avant, que celui de la présence précieuse des surveillants, référents qui mènent des activités avec les enfants et ont un vrai rôle pédagogique.
Collectif de travail, collectif de lutte
Dans les établissements difficiles particulièrement, les équipes sont soudées ; c’est là que les pratiques pédagogiques se risquent davantage à des recherches en tous genres et questionnent l’acte d’enseigner. Le travail et les réflexions de l’équipe Vercors autour de la philo pour enfants, des pratiques coopératives, du sens des apprentissages, ont certainement contribué à la force du collectif. A Vercors, on considère les élèves comme des êtres qui pensent, on fait le pari de l’intelligence, on croit en la coopération et non à la compétition. Bref, on partage la volonté d’une école émancipatrice. Pas étonnant que des élèves souhaitent participer avec nous aux délégations, nous accompagner aux quatre coins de la France. Pas étonnant que les parents soutiennent le mouvement, même si des tensions peuvent surgir lorsqu’il dure.
Dans notre collège, les mobilisations collectives ont toujours été massives et déterminées. Sur la question des moyens et des effectifs la lutte collective a été souvent de mise et elle a payé. Entre 2009 et 2016, de nombreuses mobilisations (grèves, opérations collège mort, exercice du droit de retrait, avec saisie en 2012 du CHSCT) ont permis d’ancrer dans le collectif des pratiques d’auto-gestion : chacun prend un rôle et se l’approprie ; une rotation des rôles se met en place (représentant lors des délégations, contacts presse, conception de slogans et de banderoles...).
Toujours des moments de réunion collective permettent de faire le point : c’est à ces moments-là qu’après l’expression des doutes, grandissent au final notre détermination, notre puissance d’agir.
De Lyon à Paris, au Rectorat, à l’IA, nous étions partout
On ne nous écoute ni à l’IA ni au Rectorat ? Direction le Ministère. Vendredi 9 septembre, Flixbus pour Paris. Dans le même temps, on est aussi à Lyon où Mme Belkacem visite un collège innovant.
On multiplie les actions en tous sens, on touche des médias nationaux.
On ne cède pas. Petit à petit, notre hiérarchie, elle, est contrainte de reculer : 1 CUI, puis deux... ½ poste d’AED jusqu’à l’arrivée des deux CUI.... cela n’est pas suffisant. De retour de Lyon et Paris, on se réunit le samedi matin et on reconduit la grève pour une nouvelle semaine qui va débuter, plus déterminés que jamais face à la dernière proposition de l’Inspectrice d’Académie qui ne sait toujours pas compter.
Ce que l’on veut c’est 1 poste et demi d’AED. On ne l’aura pas. Mais on obtient au final 1 temps plein et demi de surveillance (2 CUI et ½ poste d’AED). Et c’est bien la grève qui les aura fait reculer. Au bout de 9 jours.
Ce que nous défendons, nous le défendons pour tous
De ce début d’année, nous ressortons donc gonflés à bloc, pleins de désirs de travailler, de réfléchir, d’inventer ensemble parce qu’on en a envie. De continuer à penser autour de cette mobilisation qui a été intense, riche de ce qui s’est joué en terme d’affects, de réflexion politiques, de prises de conscience...
Il n’y a pas que nous, il y a le reste, les autres.
La caisse de grève mise en place a été largement abondée. Cela permettra de prendre en charge la totalité ou une partie du salaire laissé par certains d’entre nous.
Ce que l’on a obtenu, il va falloir batailler pour le pérenniser.
La dégradation des conditions de travail se poursuit ailleurs, dans l’EN mais aussi plus largement. Contre-réformes. Fermeture des ITEP, évaluation des enseignants.
Nous être battus nous donne envie de continuer à questionner. A nous mettre en mouvement, encore ?
En tous cas, force est de constater que la grève a marché. Nous a permis de gagner. Nous a rendus plus forts.
A bon entendeur, salut !