Marquée par la double tache de la défaite militaire et de la « Semaine sanglante », la IIIe République est d’abord dominée par les monarchistes et ne doit sa survie qu’à leurs divisions et ambitions. Lorsque les républicains accèdent au pouvoir (1875-1879), une série de lois vont s’attacher à rallier les travailleurs au régime :
- - lois Jules Ferry sur l’école gratuite, laïque et obligatoire pour les enfants de 6 à 13 ans (ce qui de fait rend illégal le travail salarié des enfants avant 13 ans).
- - loi Waldeck-Rousseau de 1884 qui légalise enfin les associations ouvrières ; mais ce droit n’est pas reconnu aux fonctionnaires et agents de l’Etat.
Toutefois pour ces mêmes républicains, la loi s’arrête aux portes des entreprises où, au nom des principes de liberté et de respect de la propriété, les patrons dictent la leur, n’hésitant pas à exiger le concours de l’État pour protéger leurs intérêts. Ainsi, le 1er mai 1891, à Fourmies, une manifestation est réprimée. La troupe tire sur les ouvriers et fait dix morts. L’année suivante, les mineurs de Carmaux, en grève pour la réintégration du maire qu’ils ont élu, subissent également les menaces de l’armée.
Malgré tout, les syndicats désormais autorisés se développent. Les nombreuses associations ouvrières, clandestines ou tolérées sous couvert de mutuellisme, sont officialisées. D’autres se constituent. Les syndicats, d’abord très locaux et très spécifiques se sont regroupés à la fois au plan local (Bourses du travail), au plan des métiers (syndicats nationaux) et des secteurs ou branches (fédérations) pour construire un outil commun :
En 1895, naissance de la CGT
achevée en fait en 1902 par la fusion avec la Fédération des Bourses du Travail.
La première revendication commune à l’ensemble de la CGT est celle de la journée de huit heures. Le Premier mai, choisi par les ouvriers américains pour porter cette revendication était devenu, après les massacres de Chicago (1886), à l’appel de la 2e Internationale, la date mondiale de lutte pour cette revendication.
Jusqu’en 1919, la CGT reste la seule centrale syndicale commune à l’ensemble des travailleurs. D’abord dominée par le courant anarchiste d’inspiration proudhonienne, elle subit également l’influence des différents courants socialistes qui seront unifiés en 1905. Pour maintenir son unité malgré ces influences politiques diverses, la CGT adopte lors de son congrès d’Amiens en 1906 une charte visant à tenir l’action syndicale à l’écart du domaine politique (voir à ce sujet l’article « syndicalisme et politique »)
Les fruits du rapport de force
- 1892 : la journée de travail limitée à 10 h pour les enfants de 13 à 16 ans ;
- 1895 : loi sur la caisse maladie des mineurs ;
- 1898 : loi sur les accidents du travail ;
- La loi de 1901 sur les associations permet aux fonctionnaires, en particulier aux enseignants, de se constituer en association professionnelles alors même que le droit de constituer un syndicat leur est refusé. Les premières associations de spécialistes apparaissent dans ce cadre.
- 1906 : repos hebdomadaire obligatoire du dimanche ;
- 1910 : loi sur les retraites ouvrières et paysannes.