1944. Dès la libération du territoire, alors que CGT et CFTC sortent à peine de la clandestinité, Irving Brown, envoyé des syndicats américains (AFL-CIO), avec le soutien financier et administratif des services secrets des USA, prend les contacts pour susciter et organiser la fracture de la CGT. Quatre ans plus tard la scission est réalisée par la fraction « Force ouvrière », marquant durablement la division du syndicalisme français.
A la Libération, les forces politiques et syndicales issues de la Résistance entendent mettre en application le programme du Conseil National de la Résistance (CNR). Le rapport de force favorable aux forces de progrès et aux travailleurs permet des avancées notables : nationalisations de cinq grandes banques, des industries de production d’énergie (électricité, gaz, charbon) et de la régie Renault ; droit des salariés dans les entreprises, sécurité sociale, etc. Les structures et les militants de la CGT s’investissent dans la construction des caisses (nationale, départementales, locales) de la Sécurité sociale créée par les ordonnances de 1945 à l’instigation du ministre Ambroise Croizat (voir et faire voir à ce sujet les deux films de Gilles Perret : "Les jours heureux" et "La Sociale").
1947. Dans un contexte de conflits sociaux de grande ampleur et parfois violents (mineurs du Nord/Pas de Calais ; usines Renault ; dockers de Marseille) et de début de guerre froide (plan Marshall ; soutien logistique des services secrets américains) la fraction « Force ouvrière » provoque la scission de la CGT.
1948. Face à cet éclatement , la FEN (issue de l’ex FGE-CGT) décide de refuser la logique de scission et de rester unie pour œuvrer à la réunification. Pour ce faire, la FEN devra rester provisoirement autonome et respecter le pluralisme interne (courants de pensée, tendances). Mais très vite la tendance majoritaire dans le SNI et dans la FEN prétend imposer son orientation à l’ensemble des syndicats de la fédération.
1964. La majorité de la CFTC décide de renoncer à la référence confessionnelle et fonde la CFDT. Une minorité décide de maintenir le sigle CFTC et l’orientation religieuse. Avec la création de la CGC à la libération, ce sont désormais cinq confédérations, CGT, CFDT, FO, CFTC, CGC, qui divisent plus qu’elles ne rassemblent les travailleurs, auxquelles il faut ajouter la FEN qui reste autonome.
Toutefois l’unité d’action CGT/CFDT reste une réalité dans les années soixante et soixante-dix, souvent dans les luttes locales, mais aussi dans des mouvements plus vaste ; ce sera le cas en 1968 où les luttes aboutissent à la quatrième semaine de congés payés et aux accords de Grenelle (augmentation du SMIG de 35 %, celle des salaires de 10 %, une réduction du temps de travail avec les 40h comme objectif, amélioration du droit syndical dans les entreprises).
1992. Le sabordage de la FEN.
En 1992, la FEN exclut le SNES et le SNEP majoritairement opposés à la ligne de renoncement de la FEN. Le SNI-PEGC devient le SE, mais une partie des militants et des adhérents refusent le coup de force et décident de maintenir leur outil syndical qui deviendra par la suite le SNUIPP. Le SNETAA (Enseignement Professionnel) quitte la FEN. Dans les autres syndicats de la FEN, le même scénario se répète : départs d’adhérents et de militants ou suspension de l’adhésion à la FEN. Finalement la FEN disparaîtra lors de sa fusion dans l’UNSA avec des syndicats autonomes de la police et de la pénitentiaire.
1993. Naissance de la FSU.
En 1993 les syndicats exclus de la FEN - ou qui l’ont quittée - et les nouveaux syndicats constitués par ceux qui ont refusé l’évolution de la FEN et le coup de force, constituent la Fédération Syndicale Unitaire (FSU) qui devient rapidement la première fédération de la Fonction publique de l’État.
Au cours des années 90, l’évolution de la CFDT vers un syndicalisme d’accompagnement amènent certains de ses syndicats et adhérents à quitter la centrale ; les uns viennent renforcer la FSU, d’autres créent les syndicats SUD qui constituent avec d’autres syndicats autonomes le groupe Solidaires.
Au cours du XXe siècle, l’unité des travailleurs dans une même organisation, la CGT, a donc été divisée, morcelée, puis, dans ses dernières décennies, émiettée.
Les congrès du SNES et de la FSU se sont prononcés pour la construction d’un outil syndical de l’ensemble des travailleurs, dans une démarche dont la CGT devait être nécessairement partie prenante.
Des rencontres et des initiatives communes ont eu lieu, d’une part avec la CGT, d’autre part avec le groupe Solidaires. Ces contacts à différents niveaux sont nécessaires mais ne sont pas suffisants : il appartient à l’ensemble des salariés de se saisir de cet objectif et de peser dans cette démarche vers la reconstruction de l’unité des travailleurs.