Le colloque académique du SNES-FSU sur la retraite, à l’initiative de la commission actifs-retraités, s’est déroulé le 8 novembre à la Bourse du travail de Grenoble. Il a réuni une soixantaine de participants, ce qui fait déjà de cette initiative une réussite.
L’échantillonnage des participants (fait sur les 46 inscrits à la veille des vacances de la Toussaint) à cette initiative intergénérationnelle est très intéressant :
75% d’actif.ves et 25% de retraité.es. Ce partage satisfait les organisateurs dont l’objectif est de toucher, sur un sujet essentiel, des syndiqué.es de « terrain », dont de nombreux S1 d’établissement ;
Parmi les actif.ves, plus de la moitié de collègues de collège et ¼ de lycée, avec une quasi parité entre femmes et hommes ;
Presque 50% d’isérois mais tous les départements représentés : par ordre décroissant, la Drôme, la Savoie, la Haute-Savoie et l’Ardèche.
La journée a débuté par un panorama général de notre système de retraite solidaire, avec les différents régimes et une présentation des principes et paramètres collectifs qui le régissent. Puis l’ampleur des reculs liés aux « réformes » successives depuis 1993 dans le secteur privé et public, pour les régimes spéciaux, a été soulignée. Ce système, socialement efficace et qui a fait ses preuves pendant des décennies en permettant, après la 2e guerre mondiale, de sortir les retraité.es de la pauvreté et d’élever leur niveau de vie, est aujourd’hui dégradé. Marylène Cahouet, responsable nationale SNES-FSU des retraité.es, a présenté un historique de la baisse des pensions et de son aggravation programmée : voilà le résultat des choix politiques opérés par des gouvernements de droite et de gauche.
L’intervention de l’universitaire et économiste, Michaël Zemmour, a été passionnante. Prévue en présentiel pour utiliser un terme à la mode, elle a eu lieu en visio, notre intervenant étant atteint par le covid. Les aléas techniques dans une salle sans équipement ont été fort heureusement surmontés. Nous avons bénéficié d’une intervention déconstruisant tout l’argumentaire sur la nécessité d’une réforme pour « sauver » notre système de retraite. Elle a permis d’appréhender les conséquences du projet gouvernemental, en précisant quels salarié.es seraient touché.es en priorité selon les différentes hypothèses (recul de l’âge légal à 65 ans, allongement de la durée de cotisation ou les deux à la fois), l’impact sur les retraites des femmes, la question de l’emploi des seniors.
La problématique des ressources financières a été posée, dont l’augmentation des cotisations (salariales inclus) qui est, selon Michaël Zemmour, une piste à envisager alors que le gouvernement l’écarte systématiquement, en multipliant, au profit du patronat, les exonérations et les allègements. Sa conclusion a porté sur les pistes de transformation progressiste du système avec une insistance sur la suppression de la décote.
Les échanges avec la salle ont été dynamiques et enrichissants. Comme l’a dit un stagiaire : « pourquoi est-ce qu’on ne vous entend pas plus dans les medias ? » … Ce discours alternatif qui nous « arme » en tant que militants, peut-on l’entendre chez Vincent Bolloré, Bernard Arnault et François Pinault ???
Erick Staelen, représentant de la FSU au COR, a évoqué le Code des pensions civiles et militaires, qui fonde notre régime spécial de retraite. Il a insisté sur la retraite, élément du statut des fonctionnaires, et sur la pension, traitement continué après la fin de la carrière, en justifiant cette spécificité que nous devons collectivement défendre. Il a ensuite présenté le Conseil d’orientation des retraites (COR), sa composition, son fonctionnement et ses rapports publiés régulièrement, dont le pouvoir utilise les conclusions. S’appuyant sur le dernier rapport, notre responsable national SNES-FSU a démonté, comme Michaël Zemmour, l’antienne du discours libéral sur le financement impossible des retraites. Les dépenses de retraites dans le PIB n’exploseront pas, malgré le vieillissement continu de la population, et resteront maîtrisées jusqu’en 2070 (projection qui peut interroger). Il n’y a pas de déficit alarmant des retraites, tous les intervenants l’ont souligné. L’objectif de la réforme n’est pas économique mais idéologique : reculer l’âge de départ à la retraite et faire des économies sur la masse des retraites en baissant les pensions de manière drastique.
La paupérisation des actuel.les et futur.es retraité.es et la réduction du temps passé en retraite sont des choix de société que nous refusons.
Nous avons des propositions : dégager des recettes supplémentaires avec plus d’emplois, de meilleurs salaires, bases des cotisations, en faisant avancer l’égalité salariale femmes-hommes, en taxant les revenus financiers tout en luttant contre la fraude fiscale …
Pour le SNES et la FSU, de nouveaux droits pour une retraite plus juste et solidaire, comme pour l’ensemble de la protection sociale, exige un autre partage des richesses entre capital et travail. C’est dans cette bataille syndicale que nous sommes engagés.
Le Colloque actifs-retraités a été un temps important pour former, informer, essaimer nos analyses et revendications pour lutter contre le discours unique et préparer la mobilisation face à un projet de régression sociale.
Marie-Laurence Moros, responsable académique des retraité.es du SNES-FSU
Les documents qui ont été fournis aux participants et d’autres plus récents sur la retraite, sont disponibles sur le site en fichiers joints à cet article.