10 juillet 2018

Retraite et Protection sociale

Projet de réforme des retraites - 1

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La réforme des retraites promise par le candidat Macron est lancée.
Ce projet repose sur la création d’un système universel où « un euro cotisé donne les mêmes droits ».
Une large concertation citoyenne a débuté. Ainsi, a été ouverte une consultation en ligne. Elle porte sur plusieurs thèmes en présentant des constats et des propositions sur lesquels chaque internaute peut s’exprimer.
En analysant l’argumentaire et les questionnements de cette consultation, l’objectif est de montrer qu’il s’agit d’une véritable opération de propagande qu’il convient de déconstruire et de contribuer à mettre en échec. Sous couvert d’un projet de réforme plus simple, plus lisible, plus juste, plus équitable, plus solidaire, se cachent des choix politiques déjà opérés qui bouleverseraient notre régime actuel de retraites.
Les syndiqués du SNES-FSU, actifs et retraités, doivent s’en mêler. Les articles qui suivent peuvent les y aider.

Consultation publique sur la future réforme des retraites :
les dés sont « pipés » !


La réforme annoncée par le candidat Macron pour un système de retraites radicalement nouveau sur la base de « un euro cotisé ouvre les mêmes droits pour tous » est lancée.
Cette mission a été confiée à Jean-Paul Delevoye, Haut-Commissaire à la Réforme des Retraites auprès du cabinet d’Agnès Buzyn, ministre des Solidarités et de la Santé.

Sa stratégie repose sur une démarche ouverte, de démocratie directe et participative, objet d’une large communication officielle, et sur un calendrier par étapes qui prend le temps des débats.

Ainsi, le 31 mai, était ouverte une concertation citoyenne en ligne, qui s’achèvera le 25 octobre, sur le site dédié :

www.participez.reforme-retraite.gouv.fr


Cette plateforme propose à chaque citoyen de réfléchir aux différents scenarii ou alternatives à mettre en œuvre. Les internautes peuvent voter, commenter, proposer de nouvelles pistes de réflexion sur 11 thèmes pré sélectionnés. Une synthèse des débats doit être rendue publique le 29 novembre sur cette même plateforme.

Entre début septembre et fin octobre, 8 ateliers en région, composés d’une centaine de citoyens, seront organisés sur les mêmes thématiques.
De fin novembre à début décembre, un atelier citoyen aura pour vocation de produire un avis collectif par « 15 citoyens représentatifs de la diversité socio-démographique ».

En parallèle, est menée une concertation avec les « partenaires sociaux ». Elle porte sur les grands principes de la réforme, ses modalités de mise en œuvre et les conditions de la transition vers le nouveau système.
Les échanges sont organisés en 6 grands blocs thématiques, chaque bloc étant composé de 2 réunions bilatérales par organisation. La FSU a été reçue à plusieurs reprises dans ce cadre-là. Elle le sera encore lors d’une deuxième session de négociation avec les organisations syndicales fin 2018 ou début 2019 quand aura lieu la présentation officielle des grandes orientations de la réforme.

Ainsi, la démocratie sociale semble respectée dans le dispositif de concertation mais toujours sur le mode Macron ( grands principes déjà affirmés, objectifs fixés, etc… ).

Au début de l’été 2019, se déroulera la présentation du projet de loi en Conseil des ministres, suivie de son examen au Parlement.
Après le vote de la loi, les mesures de la réforme devraient se mettre en place jusqu’en 2025, notamment pour réaliser, en pratique, les adaptations nécessaires.
Mais, aux dernières nouvelles, il pourrait y avoir une « franchise » de cinq années pendant laquelle la loi ne s’appliquerait pas, puis une transition « de quatre ou cinq ans » afin de passer progressivement des anciennes règles aux nouvelles, ce qui porterait vers 2028-29.

Le pouvoir en place semble décidé à afficher une volonté de dialogue, le plus large possible, où tout est ouvert, à l’inverse d’un passage en force comme sur la loi Travail.

 Mais que cache ce bel emballage ?

Penchons-nous avec soin sur la consultation publique sur Internet. Ses modalités, les thématiques et propositions soumises au débat, seront en italique dans la suite de cet article. Les éléments d’analyse seront en caractères « standard ».


Cette consultation se déroule dans le cadre d’orientations politiques déjà tranchées :


“ La réforme à laquelle nous travaillons vise à créer un système universel dans lequel un euro cotisé donne les mêmes droits, quel que soit le moment où il a été versé et quel que soit le statut de celui qui a cotisé. Ce système de retraite, nous le voulons plus simple, plus juste, pour tous ”.




 De quoi parle-t-on avec ce projet de réforme ?

Le « système universel où un euro cotisé donne les mêmes droits » serait un système par points dans lequel un actif cotise durant toute sa vie professionnelle et accumule chaque année un certain nombre de points. Au moment de partir à la retraite, ce nombre total de points est converti en pension. Dans un régime par points classique, la pension est calculée en fonction d’une « valeur du point » valable pour tous ( par exemple, 1 point = 1,25 euro ), fixée chaque année et dite « de service ».
Tous les régimes complémentaires français ( par exemple l’ARRCO et l’AGIRC pour le régime général ou l’IRCANTEC pour les contractuels de l’État et des collectivités publiques ) fonctionnent actuellement sur ce modèle. Plusieurs pays européens ont adopté ce système, dont l’Italie ou la Suède dont le modèle sert souvent de référence.


 Ce qui ne changerait pas avec ce nouveau régime :

Les cotisations resteraient obligatoires et le principe de la répartition serait maintenu car les actifs financeront encore les pensions des retraités.

Par contre, le projet qui s’annonce ne se limite pas à la modification de quelques paramètres ( âge légal de retraite, âge de départ à taux plein, durée d’assurance, etc...), il s’agit dans les faits d’une réforme systémique qui bouleverserait en profondeur tout notre régime de retraite.


Les questions que nous nous posons.

Le débat sur la réforme de notre système de retraite ne peut se limiter à des questions d’équilibre budgétaire, ou à la seule question du montant des retraites. La création d’un système universel de retraite nécessite de revisiter l’ensemble de notre système actuel et d’imaginer les modalités de mise en œuvre des principes d’équité, de justice et de solidarité. Sur chacun des 11 thèmes ci-dessous, il vous est proposé :
de donner votre avis sur les constats et les propositions identifiés par le Haut-Commissaire à la réforme des retraites,
de proposer de nouvelles pistes de réflexion ou des solutions.

1. Quel système de retraite pour tous les actifs ?
2. Prendre sa retraite : à quel âge et à quelles conditions ?
3. Quels droits accorder aux conjoints en cas de décès ?
4. Quelle prise en compte des enfants dans la retraite ?
5. Comment conforter la confiance dans notre système de retraite ?
6. Quelle solidarité entre les actifs ?
7. Comment donner plus de choix dans la transition emploi-retraite et la gestion de la fin de sa carrière ?
8. Comment corriger les inégalités femmes-hommes en matière de retraites ?
9. Faut-il améliorer l’acquisition de droits pour les plus jeunes ?
10. Comment améliorer la couverture retraite dans le cadre des nouvelles formes de travail ?
11. Quelle prise en compte du handicap et des aidants familiaux dans la retraite ?

En quelques mots.

Le passage d’un système constitué de 42 régimes de retraite aux règles différentes à un système universel nécessite de mettre en place des règles communes à tous, lisibles et équitables. De fait, faut-il maintenir des spécificités pour mieux prendre en compte les particularités de certaines activités et de certains parcours ?

Une proposition.

Le système actuel par sa complexité (42 régimes différents) génère de l’injustice et pénalise les mobilités professionnelles.

En France, la retraite est gérée par des organismes qui fonctionnent selon une logique d’affiliation professionnelle ( salarié du privé, indépendant, fonctionnaire … ). Au total, il en existe 42, appelés caisses ou régimes de retraite, avec des règles de calcul des cotisations et des pensions souvent bien différentes.
Ainsi, selon que vous êtes salarié, fonctionnaire, artisan, commerçant, profession libérale ou relevez d’un statut particulier, votre caisse sera différente. Avec l’augmentation des mobilités professionnelles et des changements de statut au fil de la carrière, les personnes vont donc être affiliées à plusieurs régimes : en moyenne, chaque assuré est affilié à plus de trois régimes obligatoires de retraite ( de base et complémentaire ). Un tiers des assurés sont affiliés à 4 régimes ou plus.
D’autre part, ces régimes appliquent des règles différentes en matière de cotisation, de décompte des droits et de calcul de la retraite, ce qui rend difficile la compréhension de ses droits par les personnes qui ont relevé de plusieurs régimes et alimente la crainte d’inégalités de traitement. La complexité n’est pas seulement une difficulté pour chacun, dans ses démarches ou pour préparer sa retraite : elle est aussi un enjeu de cohésion et de solidarité nationale, personne ne devant avoir l’impression d’être moins bien traité que les autres.
Enfin, la plupart des régimes proposent des droits particuliers pour certaines situations spécifiques ( interruptions de carrière liées au chômage, à la maladie, à l’arrivée d’un enfant, par exemple... ) qui ne sont pas les mêmes dans chaque régime et sont financés différemment.

Êtes-vous d’accord avec le constat formulé par le Haut-Commissaire ?
Votez et/ou argumentez pour donner votre avis

3 propositions de vote : D’accord - Mitigé - Pas d’accord


À ce jour, 78 % des internautes votent « d’accord ». Est-ce étonnant ?
Non, car l’argumentaire semble objectif.
Débusquer la démagogie et la manipulation à l’oeuvre dans cette consultation nécessite un sérieux décryptage.


« Un système universel de retraites plus simple » ?


 Complexité du système actuel.

Certes, les règles sont complexes mais c’est surtout du fait des réformes qui se sont empilées depuis 2003 et qui ont fait perdre de vue la justification des spécificités ( liées à l’histoire, à des contraintes professionnelles et à la pénibilité ou la dangerosité de nombreux métiers ) dont certaines gardent leur pertinence.


 Multiplicité des régimes.

Certaines différences se justifient .
Exemple : pour les fonctionnaires, elles sont liées au statut, à la carrière et au Code des Pensions.

« 42 régimes de retraites avec des règles de calcul des cotisations et des pensions souvent bien différentes » : une affirmation à relativiser sous l’effet des réformes successives.


Note de la DSS ( Direction de la Sécurité Sociale )
pour le COR ( Conseil d’orientation des retraites ) :

Les réformes des régimes spéciaux depuis 2007.


Document de travail pour la séance du COR du 25 mai 2016 sur « La retraite des fonctionnaires et dans les autres régimes spéciaux »

Extraits  :
« La présente note a pour objet de présenter globalement les réformes mises en œuvre dans les régimes spéciaux à l’occasion des transpositions des lois de 2003, 2010 et 2014 ( incluant la Fonction publique ).
Les régimes spéciaux de retraite ont été réformés dans le sens d’une convergence sur le régime général.
Les réformes successives engagées depuis 2003 ont permis de rapprocher progressivement les règles de ces régimes de celles du régime général.


La loi du 21 août 2003 a prévu l’alignement des régimes de la Fonction publique ( et des ouvriers d’État ) sur le régime général en matière de durée d’assurance, de décote et de surcote, et d’indexation des pensions sur l’inflation, cet alignement s’opérant de façon très progressive. À l’issue d’un temps de négociation engagé à l’automne 2007, […], les dispositions relatives aux retraites ont fait l’objet de plusieurs décrets publiés entre janvier et août 2008 ( Six régimes spéciaux ont été concernés - SNCF, RATP, IEG, CRCPEN, Opéra national de Paris, Comédie française - et le régime spécial de la Banque de France a été réformé dès 2007 ) afin d’harmoniser progressivement les principaux paramètres des régimes spéciaux avec ceux de la Fonction publique, selon une montée en charge différée de quatre ans par rapport à la Fonction publique.

La loi du 9 novembre 2010 a procédé au relèvement des bornes d’âge de deux ans dans la Fonction publique dans les mêmes conditions qu’au régime général ( les âges anticipés dont bénéficient les catégories actives sont maintenus mais sont relevés de deux ans comme pour les âges des catégories sédentaires ), a mis en extinction le dispositif de départ anticipé des parents de trois enfants et a poursuivi la convergence des autres règles ( rapprochement des règles de minimum de pension sur celles du régime général, alignement progressif des taux de cotisation salariale ). Cette réforme a, comme la précédente, été étendue aux régimes spéciaux par une série de décrets adoptés en 2011 avec un calendrier différé compte tenu de la montée en charge de la précédente réforme de 2008 ( la plupart des mesures ne devant entrer en vigueur qu’au 1er janvier 2017 ).

La loi du 20 janvier 2014 a poursuivi l’augmentation de la durée d’assurance requise, à compter de la génération 1958 pour les assurés des régimes alignés et des trois fonctions publiques, pour bénéficier d’une pension de retraite non proratisée et sans décote, à raison d’un trimestre tous les trois ans pour atteindre 172 trimestres ( 43 ans ) pour les assurés nés en 1973, qui liquideront leur pension en 2035.
Cette réforme a fait l’objet d’une transposition aux régimes spéciaux par une série de décrets publiés en juin 2014 ( cf. annexe n°4 ). »



Ce document officiel atteste de la convergence des systèmes de retraite ( régime général, Fonction publique et régimes spéciaux ). La Cour des Comptes va dans le même sens dans un rapport sur « Les pensions de retraite des fonctionnaires » ( octobre 2016 ). Elle mentionne ainsi « des réformes importantes depuis 2003 » qui ont permis un « rapprochement progressif avec le régime général, certaines règles étant même complètement alignées ».

Pourquoi occulter ce rapprochement des régimes ( d’ailleurs régressif ) qui a été opéré depuis 15 ans ?...
Pour favoriser l’intox et focaliser l’opinion sur la multiplicité de régimes très différents donc, a priori, forcément porteurs d’injustices !


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Actifs, futurs retraités et retraités,
cette réforme n’est pas inéluctable !


    • Pour mieux comprendre les mécanismes de la baisse programmée des pensions, la dégradation des dispositifs de solidarités sociales et familiales ( en particulier sur les pensions féminines ), la casse du Code des Pensions de la Fonction Publique, etc…
    • pour connaître et faire avancer nos propositions alternatives sur un véritable système solidaire,
    • pour combattre ensemble, actifs et retraités, ce projet de refonte radicale de notre système de retraites et le mettre en échec,

      la commission Actifs-Retraités de la section académique du SNES-FSU
      vous invite à participer au colloque ( ouvert à tous, syndiqués et non syndiqués
      )

      PROJET DE RÉFORME DES RETRAITES

      qu’elle organise

      le Jeudi 18 octobre 2018, de 9 h à 17 h,

      à la Bourse du Travail de Grenoble,

      avec la participation de Benoît TESTE, secrétaire général adjoint du SNES-FSU
      et de Henri STERDYNIAK, des Économistes Atterrés ( Université Paris IX-Dauphine )



      Inscrivez-vous auprès de la section académique du SNES-FSU ( s3gre@snes.edu ) et pensez à déposer très rapidement au secrétariat de votre établissement, une demande d’autorisation d’absence ( avant le 18 septembre, pour qu’elle soit de droit. En voir les modalités ici ).