Alors que ces 20 dernières années la plupart des pays de l’OCDE ont mis en place des examens nationaux sur le modèle français du baccalauréat parce qu’il permet de donner une reconnaissance sur tout le territoire national du diplôme, et parce qu’il garantit la formation des élèves quelque soit l’établissement à ce niveau minimal , Blanquer a fait le choix inverse du contrôle continu pour soi-disant simplifier et re-muscler le baccalauréat.
Cette simplification risque bien de lui être fatal, et d’en faire un brevet des lycées.
Dans le même temps qu’il présente des grands plans mixité (pour occuper ses cadres et inspecteurs ?) avec la prétention de transformer la société française dans un délai de 5 ans (atteindre d’ici cinq ans, dans tous les enseignements de spécialité, dans toutes les séries technologiques et les filières professionnelles mais également dans les formations post-baccalauréat, un taux de 30 % minimum de mixité [Filles/Garçons] ), le rectorat publie des statistiques qui témoignent qu’au contraire l’Éducation Nationale œuvre à ce que surtout rien ne change en changeant tout.
En effet, alors que la suppression des séries devait mettre fin à l’hégémonie de la série S, les élèves choisissent toujours massivement les enseignements de spécialité scientifiques.
Ainsi en première, les combinaisons purement scientifiques MATHS / PH-CH / SVT (21,7%), MATHS / PH-CH SC-IG (4,9%), MATHS / PH-CH / NSINF (3,3%) sont suivies par 30% des élèves de première générale.
Si on y ajoute les combinaisons moins fréquentes comportant 2 enseignements scientifiques sur les 3, SES / MATHS / PH-CH (4,4 %), SES / MATHS / SVT (2,8 %), LLCER / MATHS / PH-CH (2,8 %), HGGSP / MATHS / PH-CH (2 %), LLCER / MATHS / SVT (1,2 %), HGGSP / MATHS / SVT (1,1 %), on compte 45 % des élèves de premières générales.
Cela se confirme en terminale, ou les combinaisons MATHS / PH-CH (18%), PH-CH / SVT (11%), MATHS / SVT (6.2%), MATHS / NSINF (2.3%) MATHS / SISPH (2,2%) comptent 40 % des élèves de terminale générale.
Tout change pour que rien ne change ?
Un autre objectif était la suppression du « carcan » des séries. Or en terminale, les 4 combinaisons les plus choisies le sont par plus de la moitié des élèves !
Mieux, on constate que Blanquer a récréé les anciens bacs B, C, D !
La comparaison avec les anciennes séries est encore plus frappantes lorsqu’on observe la répartition de genre :
MATHS / PH-CH : 65% de garçons
PH-CH / SVT : 64% de filles
MATHS / SVT : 61% de filles
MATHS / NSInf : 92% de garçons
MATHS / SI : 90% de garçons
Enterrée la mixité du bac S ! En 2017, les filles composaient 47 % des terminales S.
La révolution est telle que la répartition sociale dans les combinaisons est également inchangée !
Les très favorisés choisissent pour 41,9 % d’entre eux une combinaison scientifique en terminale ( Math/PC 25,4 % PC/SVT 10.6 % Math/SVT 5.9% )
Les favorisées choisissent pour 34,7 % d’entre eux une combinaison scientifique en terminale ( Math/PC 17.1 % , PC/SVT 11.2 % , Math/SVT 6.4 % )
Quand les défavorisés choisissent pour seulement 29,6 % d’entre eux une combinaison scientifique en terminale ( Math/PC 11.7 % ,PC/SVT 11.3 %, Math/SVT 6.6%)
Combinaisons en terminale générale | PCS TRES FAVORISEE | PCS FAVORISEE | PCS MOYENNE | PCS DEFAVORISEE |
---|---|---|---|---|
MATHS / PH-CH | 25,4% | 17,1% | 14,0% | 11,7% |
HGGSP / SES | 14,8% | 16,0% | 17,6% | 16,9% |
PH-CH / SVT | 10,6% | 11,2% | 9,8% | 11,3% |
LLCER / SES | 5,1% | 6,1% | 6,9% | 8,4% |
SES / MATHS | 6,7% | 5,5% | 6,3% | 6,3% |
MATHS / SVT | 5,9% | 6,4% | 6,0% | 6,6% |
Lire ainsi : Parmi les élèves appartenant à une PCS très favorisée 25,4 % ont choisi la combinaison d’EdS « Maths / Ph-Ch ». Source : SYSCA 2020 Académie de Grenoble document CTA du lundi 15 novembre 2021
Si on examine les 3 combinaisons les plus choisies quelque soit la PCS, MATHS / PH-CH, HGGSP / SES, PH-CH / SVT , on y trouve 50.8% des élèves très favorisés, 44.3% des élèves favorisés, 39.9% des élèves défavorisés.
La dispersion dans des combinaisons moins fréquentes (et plus hasardeuses en terme d’orientation dans le supérieur) est plus forte pour les élèves d’origine défavorisée, ce qui était prévisible. Cette réforme brouille les cartes pour les non-initiés, c’est à dire ceux dont les parents n’ont pas fait d’études supérieures. Ce seront eux les premières victimes de la réforme Blanquer.